Le marché Sénégalais des assurances est exploité par 29 compagnies dont 19 sociétés dommages et 10 sociétés vie. Ce dispositif est complété par trois sociétés de Réassurance, dont une Société locale, la SENRE, une Société d’assurance spécialisée dans la couverture des risques agricoles (CNAAS).

Le marché est bien structuré avec des organismes particuliers de relais dont :

• Un Pool de coassurance des risques TPV en automobile (une Association créée le 27/07/1998 par les pouvoirs publics et les professionnels de l’assurance au Sénégal)
• Un Pool d’assurance des risques du pétrole et du Gaz, dont l’objet est d’organiser la souscription, de mutualiser et de gérer, en tant que représentant de toutes les sociétés adhérentes, tous les risques assurables des acteurs du secteur pétrolier et gazier, des sous-traitants, des détenteurs de licence ou d’autres entités intervenant dans ce secteur au Sénégal. 
• Un Fonds de garantie Automobile
• Un Système gratuit de constat à l’amiable des accidents de la circulation « TAXAWU LEEN  »
• Une nouvelle Prévention Routière pour lutter contre la fréquence et la gravité des accidents
• Un bureau National de la carte Brune CEDEAO qui est une structure de gestion des accidents frontaliers

Il ressort des statistiques du marché sénégalais des assurances, un chiffre d’affaires de 272 068,20 millions de F CFA en 2023 contre 249 211,68 millions en 2022, soit une hausse de 9,17%. L’assurance Dommage continue sa prépondérance en termes de parts de marché avec 63,61% soit 173 059,60 millions F CFA de primes émises nettes d’annulations, tandis que l’assurance Vie représente 36,39% des parts, soit 99 008,70 millions de F CFA de chiffres d’affaires réalisé.

Entre 2023 et 2024, quelques faits marquants ont été relevés sur ce marché. Il s’agit notamment :

• Du projet de centralisation et de digitalisation des attestations d’assurance digitales

Après une centralisation réussie des attestations d’assurance automobile au sein de l’AAS, toutes les compagnies d’assurance agréées à pratiquer la branche responsabilité civile des véhicules terrestres automoteurs sont dans la phase de production et de commercialisation des attestations digitales sous format QR code. C’est le lieu de les remercier pour leur adhésion à ce projet majeur pour notre marché dont le suivi nous permettra de redresser rapidement la tendance baissière qui était notée sur cette branche malgré l’augmentation du parc automobile.

• De la gestion des recours inter compagnies :

Dans le cadre de la politique d’assainissement adoptée par les sociétés membres de l’Association des Assureurs du Sénégal (AAS) figure en bonne place le traitement et le paiement diligent des sinistres automobiles au profit des assurés et bénéficiaires de contrats d’assurance. Cependant, l’un des facteurs bloquant dans la gestion des sinistres automobiles est la problématique des stocks de recours inter compagnies non soldés.

Pour endiguer le problème des recours inter compagnies qui persistent depuis plusieurs années, une stratégie a été adoptée par le marché sénégalais en vue d’une proposition d’apurement total. Il s’agit ici d’une volonté manifestée par les compagnies membres dans le cadre de l’apurement des recours inter compagnies sur la période 2018 – 2022. Des rencontres sont régulièrement organisées entre les compagnies d’assurance pour échanger des chèques. Ceci montre leur réel engagement dans le processus de liquidation des recours en suspens dans le cadre global de l’assainissement du marché. Cet assainissement aura comme pallier la mise en place de la chambre de compensation et d’une plateforme de gestion des recours inter compagnies.

• De la mise en place d’un plan stratégique :

L’association des Assureurs du Sénégal a pris l’engagement de se restructurer en profondeur pour accompagner de manière efficace la transformation du secteur des assurances au Sénégal. C’est dans cette optique que s’inscrit la mise en place d’un plan stratégique avec pour ambition de positionner le secteur des assurances comme un véritable levier de l’émergence économique du Sénégal. Ce plan se décline en trois axes :

• Tendre vers une association de référence capable d’impulser les réformes ambitieuses nécessaires au secteur en parfaite synergie avec l’ensemble des parties prenantes et les meilleures pratiques en matière de gestion des assurances.

• Améliorer la satisfaction et la confiance des assurés par la mise en place d’un dispositif incitatif et se positionner durablement comme acteur majeur du développement économique

• S’adapter à un marché innovant et en constante évolution avec des produits conformes aux besoins de la clientèle et couvrant l’ensemble du portefeuille de l’assurance.

Pouvez-vous lister quelques obstacles majeurs qui freinent le développement du secteur de l’assurance au Sénégal. Quelles réponses préconisez-vous pour y faire face ?

L’assurance est un contrat entre un assureur et un preneur d’assurance. En échange du versement d’une prime unique ou de plusieurs primes, l’assureur fournit une prestation donnée lorsque le risque couvert contractuellement se produit.

De nos jours, l’assurance occupe une place très importante dans l’économie moderne. Son mécanisme contribue à accroître le niveau de protection de l’ensemble des biens et des individus. Malheureusement au Sénégal, l’assurance n’est pas bien comprise du grand public. Elle est souvent considérée comme une dépense inutile par les acheteurs potentiels. Dans certains cas elle est même assimilée à une taxe. Beaucoup de sénégalais n’ont pas encore intégré « la culture de l’assurance » dans leur mode de vie pour plusieurs raisons :

Une image assez négative à l’égard des assureurs jugés trop lents à régler les sinistres, prévaut dans l’opinion, entraînant un manque de confiance et une réelle désaffection.

L’offre des produits d’assurance souvent inadéquate par rapport aux réalités des populations locales et l’évaluation des risques insuffisamment précise.

• L’insuffisance du pouvoir d’achat des populations locales
• L’assurance reste limitée aux entreprises
• L’augmentation des taxes sur les conventions d’assurance (notamment la branche automobile)
• Le non-respect de l’obligation d’assurance
• Les pratiques courantes de la fraude à l’assurance : la fraude en assurance automobile et en maladie.
• Les insuffisances de la formation professionnelle
• Le nombre limité des assurances obligatoires au Sénégal
• Un secteur informel de plus en plus grandissant avec un accès limité à l’assurance
• L’assurance inclusive au ralenti avec la micro-assurance qui est encore rudimentaire.

Une meilleure gestion de la micro-assurance constitue une réponse aux besoins du secteur informel. Elle constitue un important levier ayant fait ses preuves dans des pays comme le Kenya, l’Afrique du Sud…

Pour capter l’importante masse du secteur informel, il faut adapter les produits aux besoins et aux moyens. Cette stratégie devrait s’accompagner de mesures incitatives sur le plan fiscal et d’une bonne campagne d’information et de sensibilisation sur le rôle de l’assurance dans notre société. La mise en œuvre de stratégies de communication et de sensibilisation en direction des populations permettra d’asseoir une bonne culture de l’assurance.

Pour insuffler un vent de renouveau au marché des assurances et exploiter les opportunités qui s’offrent à elle, l’Association a mis en place un plan stratégique décliné sur trois ans, 2023/2025, pour relever les défis de transformation du secteur. Ce plan stratégique a pour ambition de positionner le secteur des assurances comme un véritable levier de l’émergence économique du Sénégal. Pour réaliser cet objectif il faudra une association forte et dynamique partenaire privilégié de l’Etat, des intermédiaires et des autres opérateurs économiques pour le développement d’une assurance de qualité des personnes et des biens.

Le marché des assurances au Sénégal franchit un nouveau cap avec l’essor des technologies. Comment appréciez-vous cette évolution ?

L’Association des Assureurs du Sénégal (AAS) a inscrit dans ses grands chantiers la centralisation et la digitalisation des attestations d’assurances. La volonté des sociétés membres de l’AAS de migrer vers le numérique leur permet de lutter contre la fraude, la sous tarification, la rétention des primes d’assurance Responsabilité Civile automobile et le défaut d’assurance Responsabilité Civile Automobile. Cette volonté s’est traduite par la signature d’une convention de centralisation et d’informatisation des attestations d’assurance automobile, par tous les Directeurs généraux des compagnies dommages.

L’avenir du secteur des assurances au Sénégal se jouerait ainsi à travers le secteur du digital et plus particulièrement via celui du mobile : sur un continent où 660 millions d’habitants disposent d’un smartphone, il est désormais essentiel de miser sur les innovations digitales : « les smartphones deviennent incontournables pour agrandir la base clients d’un assureur, mais surtout pour enrichir son offre de service. En investissant le mobile, ils étoffent leur gamme de produits et renforcent leur part de marché et image de marque – indispensable sur ce type de services »

Le Digital peut être la solution pour relever les défis liés à :

L’amélioration de l’image des assureurs grâce à une communication multicanale avec les clients et une transparence accrue.

• La lutte contre la fraude ciblée (fraude à l’accès, surfacturation, assurances multiples et cumulatives…)
• L’amélioration du taux de pénétration
• La diminution des coûts de gestion
• L’augmentation des primes avec l’acquisition d’une nouvelle clientèle ultra connectée

Aujourd’hui, avec l’évolution technologique, la digitalisation est devenue incontournable. Elle assure une optimisation de temps et d’argent et permet à tous les acteurs de notre marché (assureurs et intermédiaires) d’atteindre des segments de marché plus vastes .